“Il était une fois en un temps yogi un roi puissant, extrêmement riche et prospère si comblé qu’à son esprit s’imposa un pèlerinage à pied et jeun.
Le premier jour, à trente huit degrés à l’ombre, la soif le prit. Il ne renonça pas à l’admiration de ses domestiques en y cédant et reprit sa marche. Le soleil fut au zénith. Au détour d’un virage, il aperçut enfin une étendue d’eau. Il y courut, en prit dans ses mains.
Dans sa hâte, le joyau de la couronne se détacha de son turban et tomba dans l’étang. Ces pierres précieuses, de grandes tailles et parfaites, représentaient une immense valeur. Le roi enjoignit à l’un de ses domestiques de plonger à sa recherche puis à un autre puis aux autres tandis qu’il se lamentait.
C’est alors qu’il aperçut un petit yogi qui descendait la route dans sa direction. Il le héla, avec l’espoir d’être aidé. Ce dernier le lui promit, à condition que les domestiques sortent de l’eau. Le roi s’exécuta à regret. Le yogi prit dans sa poche un petit livre que le roi crut être un livre de charmes. C’était en fait la Gita.
Le yogi le lut longuement devant son auditeur, vivement intéressé sinon fasciné au point que l’interruption de la lecture le surprit. A fortiori quand le yogi l’invita à récupérer, dans l’étang, le joyau, petite bosse boueuse dans l’eau, redevenue claire après l’agitation des domestiques dont témoignaient les empreintes de pas. Le soleil éclairait de nouveau les contours d’un fond où nageaient des poissons.
L’intérêt didactique de cette histoire est évident. Dans notre précipitation à étancher notre soif de désirs, nous perdons notre trésor le plus précieux, la conscience de soi, dans l’étang du mental. Nous y précipitons de plus en plus de domestiques (pensées, émotions, contrôle de soi) qui le dérangent en s’activant dans la boue.
Pour retrouver le joyau de la conscience de soi, il faut donc décanter les eaux du mental pour voir, avec le temps, non seulement dans l’étang mais aussi au-dessus, même si l’on regarde en bas.
“Assis tranquillement ne faisant rien, le printemps vient” commentent les moines Zen.
Nous devons nous mettre au diapason de la nature calme et apaisante pour éclaircir nos perceptions à tous les niveaux et remplacer la confusion par la clarté.
Yogis et mystiques ont toujours estimé l’éducation à juste valeur. Au delà de la mémorisation de données précieuses de l’éducation formelle, nous devons apprendre à penser et non à nous émouvoir, en gardant éteint ‘le bouton émotionnel’. Un mental apaisé à volonté permet d’entrer dans les franges extérieures du Samadhi et d’expanser l’horizon de conscience pour résoudre les problèmes de la vie.
Cet apaisement est un pré-requis à la méditation avancée.
— Goswami Kriyananda, Pratique Avancée de Méditation